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Dans cet article, je vais vous parler de ce que j’appelle sobrement la “logique naturo”. C’est une expression qui n’a pas d’existence officielle, qui n’est pas utilisée dans le milieu de la naturopathie (quoique vaguement évoquée dans certains blogs), mais que je trouve néanmoins assez parlante.
Cette logique, c’est celle qu’on essaye de nous faire comprendre en première année de naturopathie, parce que c’est vraiment un mode de pensée à adopter, complètement différent de celui auquel on a été habitué. Pour ma part l’appropriation de cette logique a été un looong processus. C’est notre manière de raisonner et de voir les choses pour la compréhension et la prise en charge de notre client.
Je vais prendre un cas pour expliquer mon propos : l’exemple d’une huile essentielle (euh, quel rapport me direz-vous ?). L’huile essentielle est extraite d’une plante. Les composants actifs présents dans l’huile essentielle sont ce qui permet à la plante de se défendre contre les agressions extérieures (vent, chaleur, froid, mais aussi bestioles en tout genre). Plus la plante sera dans un endroit aux conditions rudes et plus elle devra avoir de composants chimiques pour se défendre.
Par exemple, la lavande fine sauvage, qui pousse en haut de la montagne, aura plus de substances donc plus de propriétés biochimiques, que la lavande officinale (ou lavande vraie) qui pousse à moins de 800m d’altitude.

Prenons l’autre exemple des fruits et légumes que nous consommons. Aujourd’hui, tous sont cultivés, on n’en consomme plus (ou quasiment plus) qui sont à l’état sauvage. Les cultures permettent d’augmenter les rendements. Dans une agriculture conventionnelle, on protège les plants en les arrosant de “tueurs” : fongicides, insecticides, pesticides. On peut faire une analogie entre ces produits et les composants biochimiques d’une plante à huile essentielle. Sauf qu’ici, ces “tueurs” protecteurs sont apportés par l’homme, la plante n’a donc plus besoin de se défendre et de produire de substances pour cela. Elle sera donc beaucoup moins nutritive. En revanche, elle pourra mettre une plus grande partie de son énergie à faire des fruits et des légumes plus gros, et plus goûtus pour nous humains. Si l’on croque une pomme d’un pommier sauvage, la pomme sera minuscule et probablement un peu âpre, mais surement tout aussi (si ce n’est plus) nutritive qu’une pomme achetée au marché. Par contre, la pomme du marché est plus sucrée et plus adaptée pour faire une tarte Tatin :).
À ce stade, vous vous demandez peut-être où je veux en venir ?
Pour moi, on peut appliquer ces deux exemples à l’homme et à sa santé.

Ce qu’on nous a inculqué depuis toujours, ou du moins depuis le début du siècle, c’est qu’il faut vivre dans un environnement le plus sain possible pour limiter les attaques de microbes (bactéries, virus…) sur notre organisme. On a une approche ou l’on cherche à supprimer les agressions extérieures. Une grippe ? Vite, tuer le virus !
En naturopathie et plus généralement dans toutes les approches dites “complémentaires”, on considère que l’environnement est ce qu’il est, avec toutes les hostilités qu’il comporte (écarts de température, microbes, pollutions diverses, stress…). Lutter contre lui serait un peu comme pisser dans un violon ou prêcher dans le désert. Bien sûr, nous ne sommes pas à l’abri de gros pépins et c’est là que la médecine conventionnelle intervient. Mais là je parle de se prémunir contre l’environnement au sens général, de toutes les agressions quelles qu’elles soient.

En prenant en compte le terrain (cékoiça? J’y reviens !) d’une personne, on peut agir sur sa capacité à se protéger elle-même contre l’adversité.
On peut prendre l’exemple d’un bateau qui vogue sur l’eau : vous aurez mieux fait de réparer la structure du bateau plutôt que de passer votre temps à écoper l’eau qui rentre à l’intérieur. Enfin, vous faites comme vous voulez au final… Mais la première solution semble plus efficace pour garantir une bonne flottaison et mieux affronter les éléments.
Votre bateau, c’est le terrain.

Le terrain, c’est tout ce qui fait qu’on est nous et pas quelqu’un d’autre (CQFD). C’est le bagage qui nous constitue (inné et acquis), et qui conditionne la manière dont on vit, dont on réagit face à la vie. Il prend en compte notre hérédité, notre environnement, notre éducation, nos modes de pensée…). Plus le terrain est solide et mieux le corps saura se prémunir des attaques, plus on sera en quelque sorte “adapté à la vie”. Du terrain dépendent la qualité des flux qui circulent dans notre corps (le sang, la lymphe, la bile…), ainsi que le bon fonctionnement des systèmes de notre corps et notamment le système immunitaire qui fait barrière face au monde extérieur.
Si vous connaissez Age of Empire, un jeu vidéo de stratégie de ma jeunesse, qui consiste à bâtir une civilisation tout en se protégeant des agresseurs, cet exemple va vous parler : c’est un peu comme si votre palissade était pleine de trous, laissant passer l’ennemi à tout va. Vous aurez beau amener des fantassins à l’endroit de l’attaque pour remettre de l’ordre, vous épuiserez rapidement vos troupes et c’est autant d’énergie que vous ne pourrez pas investir ailleurs (à la cueillette, à la construction de nouveaux bâtiments…). Et l’ennemi reviendra par une autre brèche juste après. Si vous réparez les trous et consolidez la palissade, voire que vous construisez une muraille à la place, ce sera forcément plus facile de se défendre et vous pourrez alors plus facilement faire vaquer vos hommes à d’autres occupations. D’où l’importance d’être organisé en interne pour ne pas dilapider son énergie à se défendre contre l’extérieur.

La logique naturo(pathique) consiste à travailler pour maintenir ce terrain le plus solide possible afin que l’environnement extérieur ait un impact diminué voire nul sur nous. C’est aussi ce que l’on appelle l’approche de terrain : soigner le terrain plutôt que soigner les symptômes (on laisse ce dernier à la médecine, soigner étant strictement réservé au corps médical, cf. mon article sur La place de la naturopathie en France).
La différence peut paraître subtile quand un patient va nous voir en cabinet pour une problématique précise (une maladie, un syndrome, un symptôme, chronique ou aigu). On ne va effectivement pas s’attaquer (directement) à sa maladie, tout au plus pourra-t-on apporter un certain soulagement des symptômes -quand c’est possible-. Par contre, on va étudier comment la personne est faite (compréhension de son terrain) afin d’apporter les coups de pouce dont elle a besoin pour revenir à son équilibre. C’est une démarche active de la part du client, qui permet également de mieux connaître ses points forts et ses faiblesses.
Le microbe n’est rien, c’est le terrain qui est tout.
Citation employée moult fois sur la toile, qui est de Antoine Béchamp, Louis Pasteur ou Claude Bernard, on ne sait pas trop